Souvent un changement d’employé(e)s transporte une certaine ambivalence. À la fois, cela est très complexe, mais aussi très inspirant et agréable.
Le changement d’employé(e) est complexe, car il est anxiogène et couteux. Il faut évidemment passer par la période de transfert des savoirs et compétences de l’employé(e) précédent(e), sans ses travers, évidemment. Et si le climat était assez harmonieux pour que l’employé(e) sortant(e) ait la bonté de transférer les choses adéquatement, tout va bien. Mais vous savez bien que ce n’est pas tout le temps le cas. Déjà parce que lorsqu’on met à pied une personne, cela se fait rapidement. Soit qu’on est assez insatisfait ou que la personne ait fait une bourde impardonnable. Dans l’un comme dans l’autre, la personne impliquée n’a aucune envie de transférer et parfois n’en a même pas l’occasion temporellement parlant. Parfois c’est la personne au travail qui décide de faire défection par elle-même. Dans le meilleur de cas elle donne un préavis, mais souvent bien trop court. Dans le pire des cas, elle ne rentre pas travailler tout simplement, vous laissant en plan ! S’il s’agit déjà d’une nouvelle recrue qui n’a même pas eu le temps de bien s’installer et que la personne précédente est déjà partie, vous n’avez carrément plus personne pour faire ce transfert et devrez le faire vous-même ! Les coûts engendrés sont importants, car personne n’est efficace immédiatement. Il faut connaitre le milieu, ses tâches, s’adapter aux dispositions des lieux… toutes sortes de choses qui ne permettent pas d’être efficient quand bien même on a toutes les compétences requises au départ. Parfois vous ne désirez pas que le transfert se fasse par la personne en poste précédente, car de toute manière il y a un remaniement des fonctions et vous voulez éviter que la nouvelle recrue adopte des comportements et attitudes inadéquats. Là encore ce n’est pas rien. Il n’est pas rare que, tout un chacun, à un moment donné, change ses procédures de travail pour les adapter à sa personne, pensant que c’est mieux ainsi alors que cela ne l’est peut-être pas pour l’organisation. Au final, changer de personnel est toujours très exigeant et fatigant.
Par ailleurs, l’autre versant d’agréabilité s’y ajoute. La nouvelle recrue veut bien faire, veut montrer qu’elle sait faire ce pour quoi elle a été engagée et fait preuve d’une rapidité d’exécution empreinte d’une volonté et d’une motivation exceptionnelles. Se sachant en probation, la personne nouvellement arrivée vous charme pour assurer son maintien en emploi. Et cela fait du bien, un bon vent d’air frais circule dans l’air, comme une impression qu’enfin on a la bonne personne. Cela rassure quant aux changements et ses exigences. Et cela installe également la barre des attentes managériales plus hautes puisque la personne semble capable de déplacer des montagnes. Elle propose beaucoup d’idées également, prête à prendre en charge leurs mises en place. Vraiment, c’est la personne qu’il vous fallait !
Mais la relation avec les employé(e)s, c’est un peu comme une nouvelle relation amoureuse. Que la personne a de qualités extraordinaires ! On ne voit aucune de ses limites et faiblesses au départ. On ne voit que ce qui va bien. Et dans les faits, cette personne s’implique vraiment beaucoup, montre son côté le plus chic, le plus agréable. On ne pourrait lui en vouloir, c’est tout naturel. Mais avec le temps, tout comme dans la relation amoureuse, les choses se tassent, se diluent un peu plus. L’implication s’essouffle pour plusieurs raisons. Une certaine habitude s’installe et les choses ne sont plus faites aussi bien, aussi rapidement également. Comme dans la relation amoureuse où les partenaires font moins d’efforts, l’employé(e) a pris la mesure de l’environnement qui l’entoure et s’est rendu(e) compte que certaines choses pouvaient être ralenties. Mais elle a aussi besoin de souffler, car ce rythme effréné des débuts ne peut se poursuivre à long terme.
Il y a cependant un problème : vous avez gouté à ces performances extraordinaires, et vous vous attendez à ce que cela continue ainsi. Vous vous y attendez tellement que vous lui en confiez plus justement. Puisqu’elle est si efficace, on peut se le permettre. Cependant, comme la personne s’est fatiguée à vous impressionner, elle commence à faire des erreurs. Par ailleurs, certaines choses la dérangent et comme elle n’a pas osé en faire part avant, cela s’est accumulé et devenu très important. Après tout, si cela faisait l’affaire jusque-là, pourquoi cela ne la ferait plus maintenant ? Mais comme elle n’a pas manifesté avant tout ce qui pouvait la déranger, cela s’est incrusté aussi comme une normalité, ne lui laissant plus de place pour justifier une demande ou un changement, la laissant de plus en plus insatisfaite et de moins en moins emprunte de la volonté de vous impressionner. Les ardeurs du début se ternissent.
Votre gros souci est d’avoir été tellement séduit(e) par cette nouvelle recrue que vous en avez oublié de la ralentir sur certaines de ses ardeurs du début ou de voir honnêtement que c’était la période lune de miel, qu’un réajustement s’opèrerait. Et vous êtes tombé dans le piège en lui en donnant davantage puisqu’elle est capable.
L’idée n’est pas de sous-exploiter le potentiel des personnes au travail. Pas plus que de les sur exploiter. L’important est d’être juste et honnête. Si la personne vous impressionne, vous savez qu’elle veut rester et donner le meilleur d’elle-même. C’est tout de même un bon signe. Mais tout à un coût. Vous devez aussi vous attendre à un réajustement des pendules sans l’empêcher de faire bien les choses. Car si la personne s’ennuie, elle s’en ira aussi. Donc cela veut dire ne pas vous laisser berner par les débuts flamboyants et vous assurer que ce qui doit être fait le sera encore après l’exaltation du moment.
Vous devez donc anticiper ce que sera la performance après cette période de sur efficacité. C’est à cela que vous devrez vous attendre. Cela veut dire aussi savoir augmenter les cadences et les exigences de manière graduelle. Une personne performante aura un élargissement de son éventail de capacité et de responsabilité, mais pas une augmentation en volume pour autant. Au début votre recrue fait énormément et rapidement quelques tâches et ensuite elle fait modérément plus de tâches. Évidemment cela vous demande d’être au courant du poste en question, de ce qu’il y faut comme compétences et aptitudes pour bien anticiper, évaluer, adapter. C’est tout de même le minimum qu’un gestionnaire devrait avoir en tête afin d’avoir une délégation des tâches efficace, efficiente et vous laissant avec une information adéquate des choses. Quand on ne sait plus ce que font nos employé(e)s concrètement, on ne peut savoir ce qu’ils font bien et ce qui devrait être amélioré. Cela arrive lorsqu’on a été tellement séduit(e) qu’on donne les coudées franches aux personnes rapidement sans ensuite pouvoir s’apercevoir des inévitables erreurs qui s’installent par la force naturellement humaine des choses.
Alors, restez à l’affut et ne soyez pas aveuglé(e) par les débuts flamboyants. Vous risqueriez d’y perdre.
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